Ruralité : des gîtes pas tout à fait comme les autres

Un village de gîtes construit à Marquixanes offre 45 places accessibles à tous les publics en situation de handicap ou non.

On a beau parfois connaître son territoire jusque dans les plus intimes de ses plis, il reste toujours une possibilité de se faire surprendre. C’est un peu ce qui arrive à celui qui n’a pas pris, depuis un moment, la route entre Marquixanes et Arboussols, au-delà de la première épingle. En contre-haut de la route, sur la gauche, c’est un petit village qui est sorti de terre en moins de trois ans. Une poignée de bâtiments assez grands, insérés dans un jardin en devenir. C’est Cédric Marteau qui nous y accueille et nous conte la genèse de l’histoire. Au commencement, il y a donc des amis d’enfance confrontés au handicap, l’un, Luc Toreilles par son métier, l’autre Cédric, dans sa fratrie qui compte une sœur autiste. “Nous avons fait le constat que tout le monde fait dans le monde du handicap, les vacances c’est très difficile. Les structures d’hébergement ferment et il n’y a plus de relais pour les familles pendant l’été. Nous nous sommes donc demandé s’il existait quelque chose, en particulier pour les personnes en situation de handicap mental et nous avons créé l’association Alter et Go, pour justement développer des séjours à destination de ce public en particulier. Avec le coup de pouce d’Hermeline Malherbe et du Conseil départemental, elle s’occupait à l’époque, c’était il y a plus de 10 ans, de la question du handicap, l’association connaît un démarrage rapide.”

Problème d’hébergement
Preuve que la demande n’était pas satisfaite. Elle organise des séjours pris d’assaut, déborde vite dans les départements voisins pour s’installer rapidement à Montpellier, puis Toulouse, même si l’offre était plus importante dans la ville rose. “Nous essayons de faire en sorte de passer prendre les personnes que nous emmenons en vacances au plus près de chez eux” détaille Cédric Marteau.
En quelques années, ils élargissent aussi le spectre des personnes qu’ils accueillent. “Nous avons commencé avec des adultes, parce que c’est plus simple, mais nous avons vite été confrontés à un problème difficile à résoudre, celui de l’hébergement” ajoute-t-il. “Pour nos publics, il faut que les lieux soient adaptés, ou au moins que les gîtes que nous pouvons louer aient des chambres au rez-de-chaussée, ou mieux, qu’ils soient de plain-pied. C’est déjà une condition restrictive. Mais en plus, toutes les structures d’accueil ferment au mois d’août naturellement, quand tout le monde est en vacances, la concurrence est rude pour les locations…” C’est de ce constat qu’est née, il y a environ dix ans, l’idée qui conduit l’Agri ici. Est sorti de terre depuis un village de gîtes adaptés construit à Marquixanes. Entre-temps, Cédric a laissé tomber son parcours professionnel à Paris pour revenir en pays catalan et donner la main auprès de sa sœur. Et se lance à corps perdu dans le projet. “On s’est dit, puisque c’est difficile de trouver des hébergements, pourquoi ne pas construire le nôtre, pour nous en servir et le mettre aussi à disposition des autres associations qui font le même travail que nous ?”

Ouvert à tous
Dès lors, il a fallu monter le dossier, trouver un terrain, les financements… C’est l’ancien maire de Marquixanes qui finira par attraper la balle au bond en proposant un terrain de deux hectares, de l’autre côté de la Têt. Terrain qui avait été pressenti pour accueillir, il y a longtemps, un… village vacances… On est là en 2013, la nouvelle municipalité sortie des urnes en 2014, menée par Anne-Marie Canal, emboîte le pas de la décision de son prédécesseur. C’est alors la course aux financements, subventions et prêts bancaires. Il faut trouver 2,4 M € pour faire sortir de terre le village d’écogîtes imaginé par Alter et Go (voir encadré). Le projet compte trois gîtes de 15 places, modulables en 10 et 5 places, un restaurant une cuisine et des salles, tout accessible. Et accessible à tous… “Ce n’est pas parce que c’est accessible que c’est un village de gîtes réservé aux personnes en situation de handicap. Non, le village est ouvert à tout le monde, toute l’année.” La mixité est voulue et cherchée entre populations, Alter et Go n’a pas construit un village pour les vacances des personnes en situation de handicap mais un village de gîtes adaptés à ce type de public. La nuance, subtile, est importante. “Nous louons les gîtes bien entendu pour les transferts des établissements médico-sociaux, pour les séjours d’Alter et Go et ceux des autres associations qui organisent ce type de séjours, mais aussi aux vacanciers plus classiques, aux groupes, cyclotouristes, randonneurs, qui veulent découvrir la région, il y a aussi moyen de privatiser les trois gîtes pour des fêtes de famille, mariages, anniversaires…”
“Le démarrage fut d’ailleurs fulgurant, très vite les réservations sont prises d’assaut, en 2019, et tout était complet pour l’été 2020. Mais ça, c’était avant le Covid et la cascade d’annulations qui suivit. Ça a repris un peu, on a limité la casse” explique Cédric Marteau, “mais là, avec le contexte de ce mois de septembre, ça redécroche”. Sans que cela ne l’empêche de nourrir de nouveaux plans, l’extension des hébergements insolites en contrebas de la route.

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