La peur du gendarme !

À 20 heures, rendez-vous devant la “maison de retraite”. C’est en ces termes que monsieur Milhes, policier au “commissariat” à la fin des années 60, convoquait, au début des vacances d’été, la petite bande de “sauvageons” à laquelle j’appartenais pour, disait-il, “prendre les noms et nous avertir”. Nous étions des délinquants de la pire espèce. Il y avait là Michel et Bernard de parents Espagnols ; Gilles, Hispano-Italien, Yannick, de père Polonais, William, tient un Francais et votre serviteur dont le test ADN vient de révéler 60 % Hispanique, 12 % Italien, 8 % Slave et le reste… un mélange de Breton d’Écossais et d’Irlandais. Malgré nos pédigrées impressionnants nous n’en menions pas large ! Excusez du peu !
“Tustet”* chez la mère Poincaré, inversion du capteur de luminosité pour plonger, quelques secondes durant, tout le quartier dans le noir, badigeonner le ventre des jeunes vacanciers d’extraits de “gratte culs” au motif que ça les ferait “pisser” plus loin. Des trucs… Mais des trucs immondes à faire pâlir la famille Traoré.
Lorsque monsieur Milhes, d’un ton ferme et grave nous signifiait : “Le rapport sera envoyé aux parents et monsieur le maire sera informé”, l’expression “peur du gendarme” prenait d’autant plus son sens littéral que lorsque nous rentrions chez nous les fesses serrées, nos parents nous attendaient avec la mine faussement grave et comme chez “Gilette” nous avions droit à la seconde lame. Merci monsieur Milhes de nous avoir fichu la trouille deux ou trois étés durant, merci à nos parents de n’avoir pas lancé une pétition, de n’avoir pas appelé à manifester, de n’avoir pas exigé le limogeage de monsieur Milhes. Bien des années plus tard nous avons appris la connivence entre ce policier et nos parents respectifs et lorsque nous croisions monsieur Milhes, alors à la retraite, nous le saluions très respectueusement et immanquablement celui-ci nous répondait “rendez-vous devant la maison de retraite”.

Les mots-valise et le chiffon rouge
Le temps a passé, William est retraité de la Gendarmerie, Gilles termine sa brillante carrière de cadre bancaire, Michel est loin d’être un imbécile… Il officie dans les douanes en outre-mer, Yannick a cédé son entreprise d’électricité, Bernard est toujours agent territorial. Quant à moi, j’ai la chance de pouvoir exprimer (encore) ma liberté d’esprit et d’expression dans l’Agri. Entre ce regard nostalgique et ému de ma jeunesse et le dégoût qui m’anime aujourd’hui je ne peux m’empêcher de penser qu’il faut véritablement changer le fameux paradigme. Quand j’entends monsieur Mélenchon et ses amis “antifas” et écolos qui se contentent, depuis 40 ans, des mêmes anathèmes pour défendre leur bande de potes contre la police, “j’hallucine”. Je serais enclin à demander un vrai front républicain digne de ce nom. Pourquoi pas un Front Populaire capable de penser à l’altérité pour lutter contre le racisme et le fascisme au lieu d’employer des mots-valise et les agiter comme un chiffon rouge en guise de seul argument. Monsieur Milhes aurait surement dit “pitoyable”.

* Taper aux portes à distance avec un caillou accroché par une ficelle à la poignée.

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