Aude : le dossier des zones défavorisées n’est toujours pas bouclé

Sans l’ICHN, la Piège risque de voir s’évanouir son agriculture. Photo Yann Kerveno

Les décrets d’application de la nouvelle carte des zones défavorisées n’ont toujours pas été publiés par le gouvernement.
Voilà sujet qui aura occupé l’actualité de trop nombreux mois pour ceux qui ont les mains dans le cambouis de la réforme de la carte des zones défavorisées. Il y a plus de deux ans maintenant que cette réforme est engagée en suscitant de vives oppositions dans plusieurs coins de France, dont la zone de la Piège dans l’Ouest audois. Enjeu, l’indemnité compensatrice de handicap naturel (ICHN) qui permet, le plus souvent, de maintenir de l’élevage dans des zones difficiles à valoriser autrement. Ainsi que l’est la Piège, ce secteur de vallons secs où les rendements sont minces et les brebis mises à l’épreuve du loup qui arpente le secteur. Cette réforme a été initiée par l’Union européenne qui voulait remettre de l’ordre dans la classification des zones défavorisées pour les 28 États membres. Afin d’y parvenir, les critères d’attribution de ce statut ont été revus, une équipe de l’Inra a notamment travaillé là-dessus.
À la publication de la première carte, c’est la stupeur dans l’Aude, une grande partie des Corbières ne figure plus sur la carte, ni la Piège. Et c’est un peu partout pareil en France, de vastes espaces difficiles sont exclus du dispositif. Les organisations syndicales avancent alors en ordre dispersé sur le sujet avec, d’un côté, une intersyndicale menée par Serge Vialette et la FDSEA, avec les JA et la CR et de l’autre, le collectif “Pour que vive la Piège”, en partie initié par la Confédération paysanne, qui s’est illustré l’an passé en perturbant le passage du Tour de France.

Recours en cours
Devant la levée de boucliers, le ministère rechigne mais finit par se remettre au travail, en usant d’un contingent d’hectares laissé libre par Bruxelles pour s’adapter aux contraintes spécifiques à chaque pays. Les Corbières sont réintégrées, mais pas les communes de la Piège où la résistance s’est organisée. Ironie de l’histoire, si la Piège, où l’ICHN représente le plus souvent le revenu de l’éleveur, est exclu du nouveau zonage, le Lauragais et ses plaines fertiles y font leur entrée… Aujourd’hui, une ultime carte a été élaborée, fin 2018, mais toujours pas présentée officiellement. Carte des zones défavorisées dans laquelle il manque encore 22 communes audoises. “Nous avons fait front avec les Gersois, ils ont créé une association comme nous et nous nous partageons une avocate qui connaît bien ce type de dossier et Bruxelles pour mener la bataille juridique” explique Yann Vétois, de la Confédération et du collectif. “Nous avons introduit des recours pour avoir accès à une partie des documents qui ont été transmis à Bruxelles dans ce dossier, mais nous attendons la publication des décrets d’application pour attaquer la carte devant le tribunal administratif.” En attendant les suites judiciaires, le collectif organisera le 12 avril prochain son deuxième salon de l’agriculture défavorisée.

Yann Kerveno

Serge Vialette (FDSEA 11) : “On attend l’arrêté du ministre !”
Serge Vialette, à la tête de l’intersyndicale, attend lui aussi l’arrêté du ministre qui officialiserait le nouveau découpage des zones défavorisées simples dans l’Aude. Il ne comprend pas pourquoi cette publication tarde tant. “On va bientôt commencer les déclarations PAC 2019 qui doivent s’effectuer sur la base de la nouvelle carte pour la délivrance de l’ICHN” fait-il remarquer. Sur le front judiciaire, l’intersyndicale a aussi esté en justice : “Nous avons déjà déposé des recours, mais nous attendons la publication de l’arrêté pour pouvoir l’attaquer. Nous déposerons d’ailleurs un recours régional avec le Gers, les Hautes-Pyrénées et une autre zone du Lot qui est aussi sortie du dispositif. Et nous sommes déterminés à aller jusqu’à la cour européenne de justice s’il le faut” explique le leader syndical. “Cela nous semble tellement aberrant que la Piège ait été sortie que nous sommes sûrs que nous allons y arriver.”

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